Publié le 04 novembre 2025

Une marque de distinction sociale

Longtemps, la moustache n’était pas qu’un choix esthétique : elle affirmait un rang. Chez les rois de France, elle restait fine et discrète, en signe de raffinement. Elle se développe au XIXe siècle avec Louis-Napoléon Bonaparte en 1848, dont la moustache fièrement portée inspire une mode nouvelle. Elle s’impose comme un symbole de pouvoir et d’autorité, qui est adopté par l’armée, l’aristocratie et la bourgeoisie.

Groupe amical des employés municipaux. Banquet du 9 février 1936 à l’hostellerie du Logis.
Photographie de groupe, noir et blanc. Ernest Boisnier.
Archives communales de Mérignac, 7 Num 346 [détail].

Emblème de virilité

Imposée aux militaires à partir de 1832, la moustache fait partie intégrante de l’uniforme. Sa taille est même réglementée ! Porter la moustache, c’est alors incarner, à cette époque, la force et la discipline. À travers ce geste, les soldats et gendarmes expriment une forme d’autorité, presque un symbole d’honneur.

Militaire décoré et une infirmière de la Croix-Rouge.
Carte postale photographique, noir et blanc, [1910].
Archives communales de Mérignac, 23 Fi 18.

Un privilège qui n’est pas accordé à tous

À l’inverse, les employés de service comme les domestiques, les garçons de café ou les cochers, en sont privés. La moustache permet alors de distinguer le maître du serviteur. L’usage fait ainsi naître l’expression « garçon » de café. Elle désigne même les hommes d’un certain âge, comme si l’absence de moustache les maintenait dans un état d’incomplétude, incapables d’incarner l’image de l’homme reconnu par la société.

En 1907, les garçons de café se mettent en grève pour obtenir deux droits : un jour de congé et le droit de porter la moustache. Deux revendications symboliques qu’ils parviennent à obtenir.

[Artisan. Portrait anonyme].
Carte postale photographique, 1912.
Archives communales de Mérignac, 14 Fi 298.

L’âge d’or de la moustache

À la Belle Époque, la moustache devient un véritable art de vivre. Être moustachu, c’est afficher sa puissance, sa virilité et son élégance. Les fabricants rivalisent d’inventivité : peignes, cires, peignes de poche et même protège-moustache intégré dans les tasses ou cuillères à soupe spéciales pour moustachus, fleurissent pour soigner et entretenir la moustache.

Fièrement portée par les soldats de la Première Guerre mondiale et les sportifs du début du XXe siècle, elle incarne le courage et la distinction.

Profession de foi pour les élections sénatoriales du 16 octobre 1932 (recto).
Archives communales de Mérignac, 7 Num 94.

Le déclin après la guerre

Après 1945, la moustache perd de sa notoriété. Elle devient l’incarnation du sommet de la puissance en étant portée par les dictateurs du milieu du XXe siècle, ternissant son image. Elle devient ainsi un symbole autoritaire et porte le souvenir des violences de l’époque. Dès lors, elle tombe en désuétude.

Dans les décennies suivantes, elle change de visage, devenant plus discrète, plus fine, elle se transforme en chevron des années 1980 qui est popularisé par Freddie Mercury, ou se mêle à la barbe chez les motards et est prônée par les caractères marginaux des années 1970.

Portrait de pilote.
Carte postale photographique, noir et blanc, [1910].
Archives communales de Mérignac, 23 Fi 17.

La moustache traverse les siècles sans jamais perdre sa capacité à témoigner de son époque. À Mérignac comme ailleurs, elle illustre les transformations sociales, les évolutions des mœurs et des représentations. Ainsi, en ce mois de novembre, qu’elle soit fine, épaisse, en guidon ou en chevron… portez-la fièrement !